Rectocolite Hémorragique, maladie Auto-Immune (MAI) affectant le côlon et le rectum.

Dans cette interview, Nolwenn Homps, 23 ans, revient sur le diagnostic de sa Rectocolite Hémorragique (RCH), maladie chronique appartenant aux MICI (Maladies Inflammatoires Chroniques de l'Intestin).
Pouvez-vous vous présenter ?
Je m'appelle Nolwenn HOMPS et j'ai 23 ans. Je suis née à Lorient, dans le Morbihan en Bretagne. Actuellement, je travaille comme AVS (Auxiliaire de Vie) auprès des personnes âgées et des personnes en situation de handicap.
J'ai toujours eu un goût prononcé pour le contact humain, c'est inné chez moi.
J'ai obtenu un baccalauréat professionnel en Services aux Personnes et aux Territoires, puis un BTS en Services et Prestations des Secteurs Sanitaires et Sociaux. J'ai ensuite travaillé en CDD ou en alternance, notamment dans le domaine administratif, auprès d'un public spécifique. J'ai eu l'occasion de travailler à Domitys (Résidence pour Personnes Âgées Indépendantes), à Kerpape (Centre de Rééducation et de Réadaptation Fonctionnelles) et à l’UDAF (Union Départementale des Associations Familiales).
À la rentrée prochaine, je souhaite reprendre mes études. Mon grand-père m'a parlé d'une nouvelle licence qui a été créée dans ma ville, à proximité de chez moi, axée sur l'accompagnement du handicap. Comme on dit, tout vient à point à qui sait attendre.
Quand avez-vous été diagnostiquée d’une maladie auto-immune ?
Pour entrer dans le vif du sujet, je souhaite vous parler de la RCH (Rectocolite Hémorragique) : recto signifie rectum, colite fait référence au colon, et hémorragique indique la présence de saignements. C'est une maladie chronique invisible. Sa cousine, la maladie de Crohn, qui est beaucoup plus connue, fait aussi partie des MICI (Maladies Inflammatoires Chroniques de l'Intestin).
Durant mon année de terminale, j'ai obtenu mon bac, mon permis de conduire, et j'ai effectué un voyage à l'étranger (en Finlande), tout en menant à bien un projet professionnel autour de la maladie de ma mère, la SEP (Sclérose en Plaques). Avec du recul, je me suis investie corps et âme pour réussir, d’autant plus pour le projet qui concernait ma maman car celui-ci me tenait énormément à cœur.
Je pense que le stress de vouloir bien faire, a favorisé le déclenchement de ce que j'avais enfoui au plus profond de moi, bien que cela ne soit pas la cause première de la RCH. Cette pathologie est due à des prédispositions génétiques, des facteurs environnementaux et un dysfonctionnement du système immunitaire. Il est vrai que, depuis petite, j'ai toujours été fragile du ventre. Comme on dit, notre ventre est notre deuxième cerveau et je suis convaincue qu'à force de cogiter et de vouloir faire les choses à la perfection, cela a des répercussions. De plus, mes émotions jouent un rôle important et ce que je garde enfoui en moi peut également avoir un impact négatif.
Racontez votre parcours avec votre MAI
J'avais 17 ans lorsque les premiers symptômes sont apparus : douleurs abdominales et saignements dans mes selles.
Je suis quelqu'un de résistant à la douleur, donc je me suis dit que ce n'était rien et que cela passerait. Je pense que l'exemple de battante que représente ma mère, qui ne se plaint jamais, a énormément influencé ma décision de garder tout cela pour moi. J'ai souvent agi ainsi, malgré le fait que je sois une grande bavarde. J'ai voulu attendre de voir si ce n'était qu'un passage, mais il s'est avéré que ce n'était pas le cas.
Ce n'est qu'à la fin de la terminale, que j'ai commencé à en parler à ma maman car mon état ne s'améliorait pas. Ensuite, tout s'est passé si vite. En juin 2019, j'ai passé mon baccalauréat dans de très mauvaises conditions et d’affreuses souffrances (je l’ai toutefois obtenu avec mention). Les médicaments que j'avais pris avant le diagnostic me faisaient plus vomir qu'autre chose.
Mon médecin traitant a réussi à obtenir un rendez-vous rapidement en juillet avec une gastro-entérologue qui m'a suivie pendant cinq ans.
Avec ma meilleure amie, je me suis rendue aux Vieilles Charrues (festival de musique à Carhaix), tout en respectant un régime sans résidu (aucun fruit et légume notamment) avant de réaliser ma première coloscopie. Le plus difficile, personnellement, a été la préparation à avaler. Ma prise en charge s'est bien déroulée, de l'anesthésiste jusqu'à la salle de réveil. Le diagnostic a été posé : une RCH.
Je n’ai eu aucune réaction à cette annonce mais en y réfléchissant, cela cachait une forme de déni. J'avais perdu beaucoup de poids, j'étais extrêmement fatiguée, avec des saignements et des douleurs abdominales atroces, ainsi que des vomissements et une perte d'appétit. J'ai même été en anémie au début, avec un manque de fer. Je souhaitais que ma spécialiste soit une femme car il y a la pudeur qui entre en jeu. C'est une partie intime de notre corps, et parler de selles, qu'il s'agisse de diarrhées ou de constipation, est souvent tabou.
Quelle a été votre plus grande difficulté rencontrée ?
Je vais faire un zoom sur l'année 2024. Ma plus longue poussée a duré plus de 10 mois, avec tous les symptômes mentionnés précédemment, ce qui a eu un impact énorme sur ma vie personnelle et professionnelle, de décembre 2023 à septembre 2024. Cette année a été très difficile pour moi pour plusieurs raisons dont je tairais certains détails.
Malheureusement, mon ancienne gastro-entérologue n'a pas su écouter mes préoccupations, ce qui m'a fait souffrir davantage, car le traitement était inefficace. Tout ce que je mangeais me faisait horriblement mal, et j'ai passé la majeure partie de mon temps aux toilettes, ce qui a rendu ma situation professionnelle très compliquée. Je n'ai pas travaillé de février à mai 2024.
Juste avant ma période d’inactivité, j'ai eu le malheur de demander un arrêt de travail à ma spécialiste, qui l'a refusé, alors que je sortais de consultation en vomissant. Elle m'a dit d'aller voir mon généraliste. J’étais désespérée et incomprise.
Durant cette période, je suis retournée chez mes parents avec ma chienne Sydney, qui est l'amour de ma vie et a maintenant trois ans. Je me suis inscrite à France Travail, mais sans succès. J'ai fait des candidatures spontanées, mais dans l'état où j'étais, je n'aurais même pas pu être opérationnelle. J'ai continué à perdre du poids, et une personne toxique était présente dans ma vie, ce qui a beaucoup contribué à ma difficulté à me relever.
Moi qui suis habituellement très active, je me suis retrouvée diminuée, n’ayant plus goût à rien. Une de mes rares activités était de me réfugier aux toilettes pour me tordre de douleur. Le plus dur à accepter, a été le fait de me « faire dessus », cela a eu un gros impact psychologique. La première fois a été en février, lors d’un extra en tant que serveuse à Domitys. Comment pourrais-je oublier : à la fin de la journée, en me dirigeant vers ma voiture, la catastrophe arriva une fois à l'intérieur. Je ne pouvais pas faire le chemin inverse, il était trop tard. Je me suis mise à pleurer en écrivant à ma maman. Elle m’a beaucoup rassurée. Jamais je n’aurais pensé vivre ça à cet âge. Il est très difficile de se contrôler car cela arrive soudainement. Je ne pourrais vous dire le nombre de fois où cet incident est survenu par la suite.
Tout est possible, qu’il faut savoir s’écouter et ne pas vouloir jouer au super-héros.
Si vous aviez la possibilité de retourner en arrière, que feriez-vous autrement ?
Au final, j'ai enfin mis un nom sur ce que j'avais depuis des mois. Mon regret aujourd'hui est d'avoir attendu plusieurs mois avant d'en parler, ne serait-ce qu'à mes proches dans un premier temps. Actuellement, je suis sous mon troisième traitement, que j'espère voir durer le plus longtemps possible car, en plus de cinq ans, j'ai connu plusieurs poussées, généralement longues de plusieurs mois.
Quel impact le diagnostic de votre MAI a-t-il dans votre vie actuelle ?
À partir de mai 2024, je me suis sentie beaucoup mieux mentalement, même si physiquement, la poussée était toujours présente. En juin, j'ai trouvé un travail en CDD à presque une demi-heure de chez mes parents. Cela m'a fait beaucoup de bien de me sentir utile et de retrouver une routine, bien que je n'ai cessé les allers-retours aux toilettes. J'ai toujours essayé de me dépêcher et de camoufler mes malaises auprès de mes collègues.
Le lundi 2 septembre 2024, j'ai passé une demi-journée au travail à vomir jusqu'à ce que je n'ai plus rien à rendre. Mes collègues se sont inquiétées, car je suis restée plus d'une demi-heure enfermée dans les toilettes. J'ai tout dévoilé à la plupart d'entre elles, et la responsable était déjà au courant. Elles m'ont dit qu'il fallait que je rentre et m'ont proposé de me ramener, mais têtue comme je suis, je n'ai pas voulu. Je me suis allongée un peu, puis j'ai décidé de prendre la route, même si le trajet était dangereux, car je vomissais en conduisant d'Auray à Lorient.
J'espérais pouvoir revenir durant ma dernière semaine de travail, mais cela ne s'est malheureusement pas produit en raison de mon hospitalisation. J'ai tenu bon jusqu'au mardi soir, souffrant dans mon bain à l'eau bouillante pour soulager mes douleurs abdominales. Ma maman a dû batailler pour que j’accepte d’aller aux urgences. Vers deux heures du matin, j’ai capitulé à bout de force et nous y sommes allées. Cela m'embêtait que ce soit ma mère qui doive faire le trajet pour me conduire aux urgences. Malgré le fait que l'hôpital soit à côté, le trajet fut abominable. Mon copain nous a ensuite rejoint. Je devais tout expliquer, mais je n'en pouvais plus, mon seuil de douleur étant largement atteint. Je n'arrêtais pas de mettre les doigts dans ma bouche, alors que je n'avais plus rien dans mon corps depuis plus de deux jours. Avant d'entrer dans une chambre aux urgences, le temps m’a semblé interminable. Ma maman et mon copain ont attendu plus de trois heures pour qu'on leur dise de rentrer, car j'allais y rester. Par chance, à midi, une chambre s'est libérée au service de gastro-entérologie, où j'ai séjourné pendant dix jours. Cela a été ma première hospitalisation. Je n'arrivais à rien avaler les premiers jours, que ce soit à voir, entendre ou essayer de manger, cela me faisait vomir, même avec des anti-vomitifs. Je suis descendue à moins de 49 kg, un poids que je n'avais pas fait depuis la sixième. Mes premières nuits étaient épuisantes, je passais mon temps sous la douche, à faire couler de l'eau bouillante sur mon ventre, allongée par terre avec ma perfusion.
Heureusement, mon entourage était présent tous les jours, famille et amis, et je les remercie infiniment. J’ai réalisé plusieurs examens ainsi que des prises de sang et rencontré des professionnels de santé. On m’a alors dit que si je ne m’alimentais pas, j’allais avoir une sonde, ce que je ne pouvais envisager. J'ai dû m'efforcer de manger, même en petites quantités, mais mon corps avait peur de tout régurgiter.
Quel changement de vie ou d’alimentation vous a le plus marqué ou aidé dans votre parcours ?
Cette hospitalisation m’a permise de prendre du recul et de réaliser qu'il fallait que j'écoute réellement mon corps. J’ai été très bien accompagnée par le personnel du GHBS, que je remercie énormément.
Quand j’ai enfin réussi à manger, on m’a annoncé que j’allais commencer un nouveau traitement appelé Entyvio, qui est accordé uniquement aux patients en échec (réponse insuffisante, perte de réponse ou intolérance), des corticoïdes, des immunosuppresseurs et des anti-TNF.
À ce jour, je vais beaucoup mieux, même si je souffre d'une fatigue chronique constante. J’ai désormais un excellent spécialiste et je me sens en confiance avec lui. J’ai réussi à surmonter le cap homme/femme.
Je suis aussi bénévole pour l’AFA, l’unique association pour les MICI. La santé m’a toujours intéressée, mais encore plus aujourd’hui, surtout les maladies chroniques invisibles.
Je n’ai pas de bons conseils à donner en matière d’alimentation car cela a toujours été compliqué pour moi. Il est vrai que je n’ai pas eu les codes auprès de mes parents. De plus, je suis assez difficile. Cela est déjà une contrainte pour moi, d’autant plus avec avec la RCH. Cependant, j’ai la chance d’avoir un copain qui cuisine très bien et qui travaille avec sa famille dans un excellent restaurant. Lors de poussées, je mange sans résidus mais il faut que je travaille encore sur mon alimentation ; c’est un travail de longue haleine.
Si vous devez donner 1 conseil aux personnes diagnostiquées d’une MAI, quel serait-il ?
Pour finir, j'aimerais vous dire que tout est possible, qu’il faut savoir s’écouter et ne pas vouloir jouer au super-héros. Savoir s’entourer des bonnes personnes, que ce soit sur le plan privé ou professionnel, et changer de professionnel de santé si celui-ci ne correspond pas à vos attentes.
Comment nos lecteurs peuvent vous contacter ?
Je serais ravie d’échanger avec vous, que ce soit :
Par mail : nolwenn.homps@gmail.com Sur Facebook : Nolwenn Hps Sur Instagram : nolwenn_hps Sur Snapchat : nolwennhps Sur LinkedIn : Nolwenn HOMPS Je remercie tout ceux qui m’ont aidé dans les bons comme dans les mauvais moments.
Je finirais ce témoignage avec ces citations de Bouddha : "Accepte ce qui est, laisse aller ce qui était, aie confiance en ce qui sera." "Les grands accomplissements sont réussis non par la force, mais par la persévérance." "Si on veut obtenir quelque chose que l'on n'a jamais eu, il faut tenter quelque chose que l'on n'a jamais fait."
Merci à vous lecteurs et lectrices❤️
Prenez soin de vous, c’est important !
Vous souhaitez témoigner?
Contactez-nous à contact@bienetreautoimmune.com
Bonsoir Nolwenn
Je n'imaginais pas ce que tu vivais en mai dernier quand nous nous sommes rencontrées. Tu es une très belle personne, tellement à l'écoute et sensible aux autres.
Ça me touche vraiment ce que tu vis. L'écrire, et le partager est très courageux et t'aidera certainement dans l'acceptation de ta maladie.
Je souhaite de tout cœur que tu puisses bénéficier d'un traitement qui te soulagera.
Prend bien soin de toi
Sylviane